
- Je crois que je ne sais plus écrire. Ou plutôt, que je ne sais finalement pas écrire. Ce ne doit pas être mon truc. Le roller au moins, ça roule !
- Pourtant, ces mots, ces proses, c’était bien toi ? Oui, ça ne pouvait être que toi. Et puis le roller, ça roule jusqu’à la chute !
- Oui, moi, à un autre moment. C’est moi qui les ai écrits mais je crois qu’ils ne m’appartenaient pas. Ils sont passés par moi pour que tu puisses les recevoir. Pour ce qui est des chutes, je gère.
- Oui, pour ça, je les ai reçus. Et tu me dis ça comme ça. Ce n’est pas ton truc, c’est pas toi… Les mots touchent parce qu’ils sont choisis et agencés d’une certaine façon et toi, tu sais faire ça. Je ne dis pas cela seulement parce que tes mots m’ont particulièrement touché, et tu le sais, mais j’ai fait lire tes proses à des amis et je t’assure, ils pensent comme moi, il y a quelque chose à poursuivre. Tu crois que tout le monde peut écrire ce que tu m’as écrit ? T’es un gestionnaire de chutes ?
- Oui
- Oui quoi ?
- Oui, je crois que tout le monde peut écrire ce que je t’ai écrit. C’est une question d’état. Cet hiver et ce printemps, j’étais dans cet état de nécessité d’écrire. Comme l’an passé, j’ai lu tes proses et j’ai ressenti le besoin de répondre, même si tu ne m’écrivais pas en particulier. C’est comme ça. Je pense qu’il y a des moments dans la vie où on à besoin de s’accrocher à quelque chose, à quelqu’un, de se réfugier dans une bulle. Et oui pour les chutes, je gère plutôt bien. D’ailleurs, peux-tu me passer mes coudières s’il te plait ?
- Tiens, les voici. Tu t’es accroché à ma bulle littéraire ?
- Merci. En quelque sorte, accroché à ta belle et sensible bulle littéraire.
- N’importe quoi !
- N’importe feuille !
- N’importe monnaie !
- N’importe avion !
- Tu vois, c’est toi. Les mots, tu joue avec. Que ce soit dans ta bouche sur une feuille de papier ou dans ta tête, les mots sont vivants en toi. Une phase n’a jamais un seul sens. Alors si tu continue dans l’écriture, cela ne pourra être que bon. On met les casques ?
- Cet hiver, ce printemps, peut-être qu’ils étaient vivants mais aujourd’hui, je ne crois pas. Je n’y crois plus. Par contre, ce que je crois, c’est que nous allons prendre les casques. C’est pour gérer les chutes. C’est plus cool avec la casquette mais souvent, ça fait moins mal avec le casque.
- Tu as retourné ta vie afin de pouvoir te consacrer, comme tu le disais, aux notes et aux mots et maintenant, tu me dis que tu n’y crois plus. Met ton casque.
- Je ne t’ai pas parlé de la musique. Toi aussi.
- Oui mais te connaissant, je pense que c’est du pareil au même. 2 minutes… Voilà, c’est fait.
- Oui, aussi, un peu pareil avec la musique. En fait, je ne sais pas. Et puis ce n’est pas moi qui ai choisi de retourner ma vie comme tu dis. Les choses m’étaient devenues insupportables. Même avec le petit recul que je peux avoir en 2 mois, je crois que j’ai juste précipité la fin d’une histoire qui de toutes façons, telle qu’elle était menée, était appelée à s’arrêter. Mais ce n’est pas la question.
- C’est quoi la question alors ? Les rollers ?
- « L’artiste se sent créer… », c’est inscrit sur le fronton du Palais de Chaillot et justement, je ne sens plus rien, sauf de patiner avec toi.
- Tu es un artiste ? je le savais… Un artiste sur patins…
- Ne te moque pas. Un artiste contrarié, comme il y a des gauchers contrariés ou des homos contrariés. Enfin, je ne sais pas non plus. Je ne me suis jamais satisfais du simple langage usuel et fonctionnel pour m’exprimer. Depuis mon adolescence, les mots, la musique, la photo, la vidéo. Pourtant, si j’avais eu un quelconque talent dans l’un de ces domaines, cela se serait su !
- Autoflagellation… sur rollers en plus !
- Excès de lucidité, comme cet hiver où plus rien n’allait sur des roulettes !
- Arrête…
- J’arrête et justement, je te propose d’y aller.
- Oui, voilà, c’est ça, allons patiner. C’est pour cela que nous somme ici. D’attaque ?
- Ça va le faire. C’est peut-être parce que je me défonce physiquement ces temps-ci entre la course, le vélo et le roller que mes inspirations littéraires et musicales me lâchent ?
- C’est sûrement parce que tu te décide à reprendre une réelle activité physique que tu retrouveras bientôt un nouvel équilibre et de nouvelles sources d’inspiration. Fait ce que tu dois faire et fait confiance à la vie pour le reste. On y va ?
J’adore ton pragmatisme positif. Je t’adore. Ok, on y va, on longe le canal.
…
Album : La canal de l'OurqQuatre vues de ma piste de roller du moment dans le 93.
4 images
Voir l'album